Construire en bois local : succès pour le programme à mi-parcours
Francis Cros, vice-président de la Fédération nationale des Communes forestières en charge du bois construction et conseiller général de l'Hérault, a souhaité ce rendez-vous à mi-parcours du programme "100 constructions publiques en bois local", initié en 2012, pour faire le bilan mais aussi ouvrir de nouvelles perspectives à cette action phare de la Fédération.
Le bois a l'avenir devant lui
La matinée s'est ouverte par les allocutions des deux vice-présidents du Conseil général de l'Hérault : Monique Pétard, déléguée à l'environnement, au développement durable et à l'agenda 21 et Pierre Guiraud, délégué à l'aménagement et à l'économie des territoires. Tous deux ont rappelé l'importance de la forêt dans le département, les services qu'elle apporte pour dynamiser les territoires, ainsi que la politique de soutien du Conseil général pour la valorisation de ces espaces forestiers, en lien avec la politique forestière nationale, les réflexions sur le changement climatique et la transition énergétique.
"Nos collectivités sont impliquées, il ne faut pas s'arrêter là" a encouragé Monique Pétard. Pierre Guiraud a insisté sur le rôle de la forêt comme outil de développement au service de territoires vivants et attractifs : "Le bois est quelque chose d'essentiel qui va sûrement modifier notre façon de penser l'énergie, la population, la construction et peut-être l'avenir de nos territoires".
Dominique Jarlier, président de la Fédération nationale des Communes forestières a rappelé que l'action menée pour la valorisation de la ressource bois locale dans la construction publique s'inscrit pleinement dans les grands chantiers nationaux : la 21ème conférence sur le changement climatique (COP21), mais aussi les travaux engagés par l'Etat via le Comité stratégique de filière et le Conseil supérieur de la forêt et du bois chargé de rédiger le futur Programme national de la Forêt et du bois: "La politique forestière connaît depuis peu un renouveau sans précédent. C'est une belle dynamique qui doit nous encourager. Innovons, soyons audacieux : le bois est le matériau du futur".
Un contexte favorable en France et une politique de l'Etat volontariste
Pour engager les travaux de la journée, Christian Piquet, président de France Bois Régions, a présenté aux participants les résultats de l'enquête nationale de la construction bois en France, réalisée en 2013 : "La construction bois n'est pas satellitaire mais elle est bien inscrite dans le marché de la construction en France". Bien que le secteur du bâtiment soit fortement impacté par la crise, la construction bois fait montre d'une belle résistance et a même gagné des parts de marché ces dernières années. Avec la signature récente du contrat de filière bois par 4 ministères, 16 organisations interprofessionnelles et associations de collectivités, l'avenir est prometteur.
Confirmant cette analyse, Guillaume Derombise, chef de projet à la Direction de l'Habitat, de l'Urbanisme et des Paysages (DHUP) des ministère de l'Ecologie et du Logement, a présenté les différentes politiques de soutien de l'Etat aux filières bois et matériaux biosourcés dans la construction, en lien constant avec les territoires : "Les actions nationales ne suffisent pas. Le développement de la filière passe par des approches de territoire". Les signes sont positifs, les pouvoirs publics apportent des moyens financiers et humains, une stratégie de filière se construit et des solutions sont en cours pour faire évoluer les différentes règlementations en faveur du bois dans la construction. D'autres points doivent être travaillés comme le décloisonnement des filières, par exemple l'utilisation du bois avec d'autres matériaux de construction : acier, béton...
Pour poursuivre et accompagner cette dynamique en faveur du bois, les participants ont soulevé la nécessité de démontrer la valeur et la qualité de ce matériau. La force de cette démonstration réside dans l'exemplarité de nombreux projets, dans lesquels les collectivités et l'Etat doivent être les premiers acteurs. A ce titre, l'engagement de l'Etat dans la construction d'une véritable politique de filière est un signe fort qui a mis en synergie d'autres acteurs, institutionnels et professionnels. Faire passer le message bois, c'est démontrer sur le terrain et être de plus en plus présent.
Le bois local, une plus-value pour les territoires
Utiliser la ressource locale demande de la volonté. John Pellier, chargé de mission "100 constructions de la Fédération nationale des Communes forestières a présenté le panorama des solutions existantes pour construire en bois local. L'accent a été mis sur le Code des marchés publics et les moyens existants pour s'adapter à ses règles. Différents témoignages ont été apportés sur la réalisation de plusieurs projets avec les facteurs de réussite et les moyens possibles pour lever les freins à l'utilisation de la ressource locale.
Pour cela, Nathalie Larché et Nicolas Metzger, architectes associés de l'agence Larché-Metzger, spécialisés dans la construction bois, ont témoigné de l'importance pour les maîtres d'ouvrages d'exprimer le plus tôt possible leur volonté d'utiliser le bois local. Pour la réalisation du groupe scolaire d'Hadol (88), les architectes ont bénéficié d'une implication très forte de la part de la commune. Leur expérience prouve que c'est possible d'utiliser la ressource locale : "On apprend à travailler avec le bois local. Ce matériau a une vraie plus-value".
Roland Samardia, président du Syndicat mixte du canton de Morez (39) et Jean-Louis Chabaud, maire de Barrême (04), ont présenté à leur tour les projets de leurs territoires: la plateforme bois énergie de Morez et l'atelier bois ONF de Barrême. L'accompagnement nécessaire de techniciens et des associations de Communes forestières a été souligné, ainsi que l'importance de travailler ensemble avec les entreprises et la nécessité de soutiens financiers pour ces projets innovants : "C'est un enrichissement pour un territoire de valoriser sa ressource. C'est aussi notre participation au développement durable et à l'indépendance énergétique de notre pays [...] Il y a une vraie fierté de la part des habitants de s'approprier un bâtiment construit avec le bois de leur région".
La question du surcoût lié à l'utilisation de la ressource locale a été posée à plusieurs reprises. Les élus et les professionnels présents à la tribune ont rappelé la nécessité d'intégrer d'autres facteurs et de prendre en compte le coût global : impact sur les emplois locaux non délocalisables, impact sur l'environnement, sur les populations etc. Certaines collectivités abondent même leurs soutiens financiers aux projets retenant le critère d'utilisation du bois local. Les aides européennes interviennent également dans le montage financier de ces opérations. "Nous sommes des communes forestières, si on ne donne pas l'exemple, qui va y aller ?" a conclu Roland Samardia.
La force de la démonstration
Francis Cros, en tant que vice-président de la Fédération nationale des Communes forestières en charge du bois construction et Lydie Boisse, chef de projet du programme ont ensuite fait un bilan positif de l'action « 100 constructions publiques en bois local » qui a vu naître 60 projets en cours ou réalisés en 2 ans. "Aujourd'hui ce qui est important, c'est la force de l'exemplarité » a rappelé Francis Cros: « Il faut étudier systématiquement la solution bois".
Pour récompenser l'engagement des maîtres d'ouvrage dont les bâtiments sont inscrits au programme "100 constructions", des trophées ont été remis aux élus présents. Certains bâtiments publics inscrits au programme ont déjà été primés dans le cadre du Prix national de la construction bois, organisé par France Bois Régions.
Pour compléter ce bilan, Francis Cros a présenté la politique du Conseil général de l'Hérault en faveur de la construction bois. Un des enjeux est de maintenir les populations sur les territoires. Grâce à ses atouts économiques, environnementaux et sociétaux, la forêt peut y répondre.
Les discussions de la table ronde réunissant élus, professionnels et techniciens, ont permis de dégager plusieurs pistes : mieux connaître la ressource pour mieux la valoriser localement en passant par l'échange entre les différents acteurs impliqués dans un projet; développer la certification dans les massifs mais aussi l'intégrer dans une démarche plus globale, à l'échelle nationale ; accompagner la volonté politique des maîtres d'ouvrage en lien avec les compétences des techniciens.
Concernant les perspectives du programme, plusieurs chantiers ont été proposés :
aller plus loin dans nos ambitions avec la réalisation d'immeubles de moyenne hauteur en bois local ;
-décloisonner les filières pour "mettre du bois partout, mais pas partout du bois", par exemple le duo bois/béton ;
-faire de la forêt un vecteur pour la dynamisation des territoires et le maintien des populations ;
-travailler sur le Code des marchés publics pour lever les freins à l'utilisation de la ressource locale ;
-poursuivre les démarches de certification ;
-connaître le coût global de la construction en bois local ;
-communiquer et faire vivre le bois auprès du grand public ;
-renforcer les partenariats avec les collectivités territoriales: Régions, Départements, sans oublier l'Europe et sensibiliser les associations nationales d'élus.
Francis Cros a conclu cette journée placée sous le signe de la démonstration : "Les maîtres d'ouvrage ont besoin de voir des projets. C'est le bon sens et la force des élus locaux que d'avoir une volonté politique réaliste."
En savoir plus :
- Consulter le site web du programme "100 constructions publiques en bois local : www.100constructionsbois.com
- Télécharger la sélection d'articles des bâtiments pilotes du programme "100 constructions" dans la revue EK (EcologiK), présentée par Dominique Gauzin-Müller, architecte et rédactrice en chef d'EK
- Télécharger l'article sur le colloque dans la revue EK n°43 de février-mars 2015