Congrès national : enjeux forestiers et réforme territoriale

Congrès national : enjeux forestiers et réforme territorialePlus de 250 élus étaient rassemblés à Troyes pour le congrès national des Communes forestières les 16 et 17 juin derniers. Au programme: la révision de la charte de la forêt communale définissant les rôles et les responsabilités des collectivités et de l'ONF. Autre débat important: la place de la forêt dans la réforme territoriale, en présence des présidents des principales associations nationales d'élus.


Congrès national des Communes forestières à... par communesforestieres

Le congrès national des Communes forestières s'est déroulé à Troyes les 16 et 17 juin au centre de congrès de l'Aube, avec la participation de plus de 250 élus.

Accueillis par le président Philippe Adnot, les élus se sont d'abord réunis dans la salle du Conseil départemental pour le conseil d'administration chargé de préparer les travaux de ces deux jours.

Région Grand Est : la force d'un territoire forestier

Les présidents des Communes forestières de Champagne-Ardenne et de l'Aube ont accueilli leurs collègues élus à Troyes. Ils ont tous deux évoqué l'importance de la forêt dans ce territoire et les actions menées par les Communes forestières.

Jean Pierre Michel, président des Communes forestières de Champagne-Ardenne a ouvert la partie statutaire de l'assemblée générale le 16 juin. Il a exprimé sa "fierté" d'appartenir à cette nouvelle région Grand Est. L'Union régionale des Communes forestières Champagne-Ardenne devra, dans les prochains mois, fusionner avec les unions régionales d'Alsace présidée par Pierre Grandadam et de Lorraine présidée par Jean-Claude Humbert. La grande région représente un vaste territoire forestier, avec 55 à 60 000 emplois pour la forêt et le bois, 8 850 entreprises de la filière et 1,8 millions d'hectares de forêts.

Henri Petit de Bantel, président de l'association départementale des Communes forestières de l'Aube, a accueilli les congressistes le 17 juin en présentant son association qui fédère 159 communes, soit 88% de la forêt communale du département. Il a remercié l'ancien président, le sénateur Yann Gaillard pour son engagement de 1983 à 2014. Elle développe un axe fort dans la formation des élus. Les enjeux sont multiples : "en tant qu'élu nous avons la charge de bâtir des politiques publiques pour développer notre territoire et le devoir d'avoir l'intérêt général chevillé au corps. En tant qu'élu des Communes forestières, nous avons un grand rôle à jouer dans la mise en valeur de la forêt et du bois."

2015, une grande année

Pierre Grandadam, premier vice-président de la Fédération a présenté le rapport moral : "L'année 2015 a été une grande année pour les Communes forestières. Nous avons dû répéter et répéter encore notre attachement au régime forestier et à sa mise en oeuvre par l'Office national des forêts. Ce n'est pas nouveau. Et pourtant c'est essentiel."Après la signature du Contrat d'objectifs et de performance Etat-ONF-FNCOFOR 2016-2020, le cadrage en cours de la charte de la forêt communale et l'engagement de l'Etat à Nancy en 2015 de ne pas faire supporter aux communes une nouvelle contribution au financement de l'ONF, les élus des Communes forestières souhaitent s'investir pleinement dans plusieurs projets d'avenir : poursuivre l'écoute attentive des adhérents, mieux mobiliser les bois et créer de l'emploi par leur valorisation dans les territoires, contribuer à la lutte contre les effets du changement climatique. Autant de défis que les élus forestiers veulent relever avec l'ensemble des acteurs de la filière.
En savoir plus : télécharger le rapport d'activités 2015

La charte de la forêt communale, une mise en oeuvre concrète du Contrat

La charte de la forêt communale, document contractuel établi pour la première fois en 2003, précise les rôles et les relations entre les communes propriétaires de forêts et l'Office national des forêts (ONF), gestionnaire unique des forêts des collectivités, par domaine d'activité, en distinguant les prestations de l'ONF relevant du régime forestier et celles qui relèvent de conventions avec les collectivités et, par conséquent, donnent lieu à rémunération. Dans le cadre du Contrat 2016-2020, la charte est en révision et la nouvelle version sera validée en 2016.

  

Trois groupes de travail présidés par un membre du bureau, associant des élus et des salariés du réseau des Communes forestières ont planché depuis le début de l'année sur neuf thématiques. Les présidents ont présenté à l'assemblée les résultats de leurs travaux.
En savoir plus : télécharger les compte-rendus des groupes de travail

A la suite de cette présentation, les élus sont intervenus dans la salle sur :

  • les conditions de la mobilisation supplémentaire des bois qui ne doit pas être faite au détriment d'une gestion durable et de l'impact du changement climatique.
  • les invendus élevés constatés dans certaines régions comme Rhône-Alpes;
  • le débat souhaité à propos des frais de garderie prélevés par l'ONF sur les concessions faites en forêt communale, par exemple en cas de projets éoliens ;
  • la présence des agents de l'ONF sur le terrain et leur rôle nécessaire de police dans les forêts.

Concernant la mobilisation des bois, il a été rappelé que le principe de gestion durable est premier. Il ne s'agit pas d'accélérer la mobilisation, comme l'a rappelé le président Jarlier, mais de prélever là où cela n'est pas fait. Le plan d'aménagement est un document essentiel qui définit et cadre les objectifs de cette mobilisation des bois.

Julie Marsaud, responsable forêt à France Nature Environnement a exprimé tout l'intérêt de FNE pour l'aboutissement de cette charte de la forêt communale. "Nous vous souhaitons d'arriver à équilibrer l'équation entre l'augmentation de la mobilisation du bois, les objectifs contenus dans le Contrat Etat-ONF-FNCOFOR à cet égard, la simplification des documents de gestion forestière, sujet sur lequel nous serons particulièrement vigilants."

Les contrats d'approvisionnement, une solution pour toute la filière

Un message unanime a été porté tout au long de ce congrès par les différents représentants de la filière concernant les contrats d'approvisionnement qui figurent dans les objectifs de mise en oeuvre du COP. Jean-Yves Caullet, président du conseil d'administration de l'ONF a évoqué la sécurisation des approvisionnements via ces contrats : "c'est sécuriser les volumes, sécuriser les prix et permettre aux transformateurs de se projeter dans l'avenir". Une solution portée par les Communes forestières, l'ONF, le ministre en charge de la Forêt Stéphane Le Foll et également par Philippe Siat, président de la Fédération Nationale du Bois, pour qui la question des invendus concerne moins le bois d'oeuvre que le bois énergie : "Si on ne veut pas jouer à la Bourse tous les jours, c'est les contrats", chaque fois que cela est possible, en tenant compte des contraintes liées aux diverses essences : "le contrat est un moyen d'avenir pour sécuriser toute la filière et pour construire tous ensemble quelque chose de bon." Antoine d'Amécourt, président de Fransylva s'est aussi exprimé en faveur des contrats d'approvisionnement en appelant à "plus de liens entre la forêt privée et la forêt publique pour pouvoir approvisionner nos scieurs avec des contrats communs, locaux, en fonction des endroits où sont les scieries et des bois qu'on a à mettre sur le marché."

ONF et Communes forestières, un "destin commun"

Christian Dubreuil, directeur général de l'Office national des forêts a réaffirmé : "l'ONF et les Communes forestières ont un avenir, un destin commun. Il faut retrouver un haut niveau de confiance". Il a appelé à faire vivre l'ensemble des instances de gouvernance entre les communes forestières et l'ONF, à toutes les échelles. Il a ensuite évoqué le projet d'établissement qui est la déclinaison de cette feuille de route qu'est le Contrat. En voie d'achèvement, il sera diffusé en septembre "pour une bonne appropriation par tous". Tous ces documents expriment plusieurs et mêmes objectifs : la mobilisation des bois dans le cadre d'une gestion durable, le développement des contrats d'approvisionnement, la simplification des documents d'aménagement, le maintien d'un maillage territorial et des agents sur le terrain avec 320 unités, la révision de la charte de la forêt communale. Il a appelé de son souhait la réforme de l'ONF et a réaffirmé également son rôle d'établissement public et commercial. "Les activités concurrentielles sont indispensables à l'ONF mais elles doivent être rentables". L'ONF devra également travailler dans le cadre des nouvelles régions en adaptant son organisation avec 6 Directions Territoriales (DT).
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Un message de confiance

Le ministre Stéphane Le Foll a adressé un message diffusé en assemblée. Il a exprimé sa confiance dans la mise en oeuvre du Contrat Etat-ONF-FNCOFOR avec l'équilibre à trouver sur la mobilisation des bois et le développement de la logique de contractualisation. Le ministre a exprimé son souhait de "concrétiser cette dynamique de rassemblement et de cohérence de l'offre de bois" avec, à la fin de l'année, plusieurs Groupements d'Intérêt Économique et Environnemental Forestier (GIEEF), regroupements volontaires de propriétaires privés et qui pourraient intégrer les propriétaires publics. "Les Communes forestières ont été au rendez-vous à chaque grand moment de l'histoire de notre filière bois française"a rappelé le ministre en charge de la Forêt qui a voulu adresser "un message de confiance, d'ambition et d'amitié" aux communes forestières.
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La forêt dans la réforme territoriale, la proximité avant tout

Ce congrès a réuni autour d'un débat "forêt et réforme territoriale" les trois grandes associations nationales d'élus conjuguées à trois grands échelons territoriaux, communal, départemental et régional. Avec la présence de François Baroin, maire de Troyes et président de l'Association des maires de France(AMF), Philippe Richert, président de la région Grand Est et de l'Association des Régions de France (ARF) et Philippe Adnot, président du Conseil départemental de l'Aube et vice-président de l'Assemblée des départements de France (AdF).
Deux questions constituaient la toile de fond de ce débat :

  • Comment positionnez-vous la forêt pour en faire une chance pour vos territoires ?
  • Quels moyens comptez-vous mettre en oeuvre pour donner toute sa place à la forêt, outil d'aménagement du territoire ?

Pour François Baroin, président de l'AMF, un message clair : pas de gestion intercommunale de la forêt. Une position "ferme et durable", le périmètre pertinent étant la commune. "Le principe de subsidiarité doit s'appliquer".Les syndicats forestiers sont aussi de bons outils. La commune a conservé sa clause de compétence générale et les intercommunalités sont un outil au service du développement des territoires. "Qui ne connaît pas la France ne connaît pas l'attachement de chaque habitant, de la plus petite commune, à ce patrimoine forestier. [...] Cet attachement-là est viscéral".

Pour Philippe Richert, président de l'ARF, l'impact de la forêt est très variable selon les régions mais les conseils régionaux auront "vocation et intérêt à s'impliquer de façon très forte parce qu'il s'agit d'une ressource économique". Elles devront travailler avec l'ensemble des acteurs de la filière. Il a également rassuré les élus présents en précisant que les communes sont et resteront les interlocuteurs uniques concernant la gestion de la forêt publique, aux côtés de leur gestionnaire ONF. Concernant les moyens attribués, l'ancien ministre des collectivités territoriales a exprimé sa volonté de rattraper les retards concernant l'attribution des crédits européens, notamment les fonds FEADER qui servent à la formation des élus des communes forestières. D'ici la fin de l'année 2016, avec les Schémas Régionaux de Développement Économique, d'Innovation et d'Internationalisation (SRDEII), le président Richert a rappelé que la filière bois devait avoir toute sa place.

Philippe Adnot, représentant le président de l'AdF, Dominique Bussereau a assuré que "les départements resteront un élément de proximité" aux problématiques des communes forestières. Ils seront en relation étroite avec les Régions sur les questions forestières mais aussi dans la mise en oeuvre des politiques. Également sénateur de l'Aube, le président Adnot a rappelé que les parlementaires sont là pour intervenir auprès de l'État.

Une forêt publique engagée, un régime forestier moderne

Le président de la Fédération nationale des Communes forestières, Dominique Jarlier a conclu les travaux de ce congrès, évoquant la modernité du régime forestier et l'engagement des élus : "Le régime forestier est aujourd'hui encore une garantie, une protection à l'heure ou l'espace rural se désertifie, [...] cet engagement des élus locaux, ces expérimentations dans le cadre des politiques forestières territoriales peuvent ré-enchanter le roman national, renouer les liens entre les métropoles et le reste du territoire, redonner de la fierté aux ruraux ainsi reconnus créateurs d'aménités environnementales, répondant ainsi à la nouvelle sensibilité de la société au travers des usages du matériau bois, de la conception esthétique et touristique de la forêt".
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Elodie Lematte, conseillère budget et forêt auprès du ministre de l'Agriculture, de l'Agroalimentaire et de la Forêt a repris ce qui pourrait constituer les maîtres mots de ce congrès : mobilisation des bois, contrats d'approvisionnement, regroupement de la gestion forestière. Elle a également salué "ce beau partenariat public/public, ONF et Communes forestières [...] Nous aimons cette filière, car ses acteurs sont des passionnés"